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Anne-Sophie Louvel

Directrice services collecte sélective et territoires

Interview Expert

Collecte en ville : la Smart city donnera toute sa place au tri

La mobilité, l’énergie, le logement sont des problématiques clés en zone urbaine, bien identifiées et appréhendées. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas de la gestion des déchets. A moins que la « Smart city » ne change la donne. La ville intelligente sera celle qui gère mieux ses déchets, donc ses ressources en commençant par rendre le tri plus accessible et visible. C’est le credo de Citeo qui, comme nous l’explique Anne-Sophie Louvel, directrice service collecte sélective et territoires, innove et investit dans les métropoles pour faire trier plus et mieux. 

#collecte#ville

    Quelle est la place de la gestion des déchets en ville ?

    Elle est encore mineure. Les poubelles sont restées trop longtemps cachées, et elles ne doivent plus être le parent pauvre exclu des données et des réflexions sur l’aménagement urbain. Si les villes sont pensées aujourd’hui en termes d’alimentation, d’électricité, de flux de déplacement, la question du déchet devrait, de la même manière, être assumée et trouver pleinement sa place pour ainsi rendre la collecte plus visible et le tri plus simple .

    En quoi les contraintes en centre-ville et en habitat collectif sont-elles particulièrement fortes ?

    Parfois historique, le centre-ville est un espace dense qui n’offre pas forcément de place pour installer des points de tri alors même qu’un certain nombre d’adresses sont dépourvues de bac de tri et que ces centres-villes sont aussi fréquentés par des passants (pour le tourisme, l’activité professionnelle,…). Il y a donc un réel besoin mais pour y répondre il faut pouvoir s’intégrer dans ces centres-villes : esthétisme, règles d’urbanisme, logistique, sécurité...
    Dans les grands ensembles urbains, les parties communes n’ont pas toujours été prévues à l’origine pour accueillir des bacs de tri, qui est une préoccupation finalement assez récente. Et quand ils sont installés, leur entretien n’est pas simple, les consignes de tri ne sont pas toujours à jour, ni lisibles. Pourtant, la propreté et l’accès à l’information sont des clés pour stimuler le geste de tri.
    Parmi les freins au tri en ville, on peut aussi citer l’anonymat qui règne dans les grandes villes et qui amoindrit la pression sociale en faveur des comportements écologiquement vertueux. Et aussi l’évolution des modes de consommation avec l’explosion de la vente à distance et de la consommation nomade. Ces contraintes expliquent que les trieurs systématiques sont moins nombreux dans les villes, et que in fine on trie deux fois moins les emballages en ville (36 kg/an/hab) qu’à la campagne (60 kg/an/hab). 

    Comment Citeo se positionne sur le tri en ville ?

    En apporteur de solutions ! 10 % de nos projets de simplification du tri et d’amélioration de la collecte sont portés par des métropoles et ils mobilisent 40 % de nos investissements pour la performance.
    Et puis, il y a l’innovation. Nous accordons des financements spécifiques à des projets capables de réinventer les dispositifs de collecte en s’appuyant sur l’intelligence collective et l’expérimentation. De beaux exemples en 2019, comme à Bordeaux, à Lyon avec le TriOmix en cours, à Paris avec Trilib’ ou encore à Besançon. Dans ces deux dernières villes, on déploie des points tri complètement intégrés aux codes urbains, visibles et très appréciés des utilisateurs.

    Le tri se réinvente dans la métropole de Lyon...

    TriOmix, le 1er sprint créatif qui ré-invente le tri en ville

    #innovation#collecte

    ... et aussi dans la métropole de Bordeaux

    Vivre une "expérience tri" en centre-ville de Bordeaux

    #geste de tri#ville

    Les grands leviers du Plan de performance des territoires sont aussi activés dans les villes ?   

    Bien évidemment. Nous accompagnons les collectivités locales dans ce qu’on appelle le programme d’extension des consignes de tri à tous les emballages pour simplifier le tri. Concrètement, la consigne est élargie et clarifiée pour que les Français ne se posent plus de questions et puissent trier tous leurs emballages dans le bac jaune.
    Le second élément sur lequel nous travaillons est l’identification des zones sous équipées en bacs et points de tri, et l’accompagner des collectivités pour améliorer le service aux habitants.
    Enfin, nous visons l’harmonisation des organisations du tri et des couleurs de bacs pour faciliter le tri. 
     

    En quoi une approche sociologique du tri en milieu urbain permettrait de l’améliorer ?

    La ville évolue en permanence, elle se densifie, les services s’y développent pour répondre aux besoins des citoyens, aujourd’hui en recherche de simplicité, de disponibilité et d’accès à l’information sur ces services.
    L’économie circulaire, et les déchets, sont un des parents pauvres de cette évolution. Pourtant, il serait essentiel de comprendre le comportement des citadins sur le geste de tri, de comprendre les déterminants d’un geste non ou mal réalisé, pour pouvoir adapter les équipements aux usages de la ville. Comment les gens se déplacent ? Où vont-ils ? A quel moment de la journée ? Ces questionnements trouvent des réponses dans l’utilisation de la data (qui permet par exemple de déterminer les bons endroits pour positionner un point tri et faire en sorte qu’il ne déborde jamais) et la collaboration avec les acteurs locaux (associations, bailleurs, …).
    Tout l’enjeu est de passer du national (notre Observatoire du geste de tri nous permet de dire quelles sont les tranches d’âge et les CSP plus ou moins « trieuses ») au local où, par la compréhension des usages d’une ville, on peut adapter les équipements de tri et activer les bons relais pour que l’économie circulaire y trouve sa place. 

    Dans la Smart city de demain, quelle place aura le geste de tri ? 

    J’espère que, contrairement à l’heure actuelle, il aura pleinement trouvé sa place et qu’il ne sera pas caché. Il faut pouvoir assumer que l’on produit des déchets, qu’ils soient visibles et intégrés dans un système de données d’informations pour favoriser leur recyclage ou leur valorisation.
    Quand on souhaite refaire un quartier ou une rue, de la même manière que l’on pense désormais à l’installation de pistes cyclables, la question du déchet doit avoir sa place. Le geste de tri fait partie du quotidien, c’est le premier geste environnemental et le second geste citoyen (après le vote) ; à ce titre il est légitime à occuper une part d’espace public, pour que la Smart city de demain soit réellement circulaire.
    Regardez Barcelone : connue pour ses points tri visibles, faciles d’accès et en grand nombre, cette ville investit par ailleurs dans des corbeilles de tri et des micro-déchetteries, de manière à couvrir son territoire de solutions complémentaires, pour s’adapter aux différents usages. Plus on s’adaptera aux usages des urbains, et plus on s’intégrera à leur ville, alors plus nous serons performants en matière de recyclage. 

    #collecte#ville#économie circulaire
    Collecte en ville : la Smart city donnera toute sa place au tri