Les facteurs du comportement fonctionnent en dynamique et s’équilibrent en fonction des contextes. Ainsi, si je suis certain(e) que mes emballages une fois triés vont être recyclés (connaissance des étapes du tri et du recyclage dans mon territoire, visite du centre de tri de ma collectivité), je vais plus facilement consentir à cet effort, souvent renforcé par une contrainte matérielle (espace de « stockage » dans une petite surface, bac ou conteneur de tri éloignés). Si j’ai confiance dans mes émetteurs de terrain (mon syndicat de traitement, ma mairie), je prêterais une attention plus forte à leurs messages, etc.
La dimension contextuelle est d’autant plus prégnante pour le geste de tri que la France n’a toujours pas harmonisé le dispositif mis à disposition des habitants, qui doivent en permanence, "réapprendre" un geste légèrement (couleur de bac) ou structurellement (consignes différentes) modifié en fonction de leur lieu de tri.

Au-delà de capter l’attention du consommateur sur le geste de tri, il est nécessaire d’y associer une valeur symbolique qui se développera en nouvelle norme. Quand le tri, indispensable au recyclage, se met en place, il ne répond ni à un besoin, ni à une attente. Le déchet est par essence ce que chacun souhaite évacuer de son domicile le plus rapidement possible, ce à quoi on ne veut plus penser.
La première étape de la création d’un nouveau comportement de tri a donc été pour Eco-emballages (devenu Citeo en 2017) de faire des déchets un objet de communication positive. Pour cela, l’entreprise a recours à la publicité :  mi-novembre 1993, en prime-time, les téléspectateurs voient se succéder sur l’air de Samba Saravah de Pierre Barouh*  des plans "cuttés" de bennes et de poubelles pendant que familles et rippeurs se livrent, chacun dans son espace, à une chorégraphie de gestes savamment orchestrée. Ils apprennent que « Un emballage jeté n’est plus un emballage perdu ». Un nouveau geste et un nouveau consommateur, le trieur, naissaient... .

* Samba Saravah fait partie de la musique du film « Un Homme et une femme » de Claude Lelouch

En mettant en place le dispositif de recyclage, une nouvelle réalité s’est construite, qu’il a fallu nommer pour contrarier l’imaginaire social lié au déchet, susceptible de freiner la pratique du tri. Un nouveau champ lexical et iconographique se met en place sous l’impulsion d’Eco-Emballages : "trier" plutôt que "jeter", "bac de tri" plutôt que "poubelle", "ressource" plutôt que "déchet"… .
Force est de constater que le bac de tri n’a pas encore gagné la place de "poubelle" de tri dans les esprits. Et la tâche reste complexe, rendue difficile par la multiplication des émetteurs sur le sujet des "déchets" et la diversité des gestes suggérés. "Upcyclying", "surcycling", "décycling", réemploi, réparation, recyclage … le consommateur a l’embarras des bonnes solutions et des nouveaux gestes à adopter. L’emballage avec sa multiplication d’informations et de labels, est un récipendiaire de cette créativité. Objet de nouvelles obligations législatives, l’information sur le geste de tri est cruciale pour déterminer le comportement et pour exprimer utilement et efficacement la responsabilité de l’entreprise, au cœur de la relation de confiance avec son consommateur.

Centrale dans un comportement, la norme sociale ne s’inscrit pas a priori dans le champ de l’entreprise. Pour autant, celle-ci peut agir pour construire et diffuser une prescription collective, comme elle a su le faire en inventant la culture de la marque. Par exemple, Citeo a travaillé sur les enjeux d’engagement individuel mais surtout communautaire : on adopte le comportement que notre entourage valide.
Au-delà des stratégies sociales numériques qui donnent une ampleur sans précédent à la reconnaissance et à l’expression des pairs, Citeo développe des approches centrées sur la transmission et le partage des connaissances : une consigne de tri s’apprend plus vite transmise par un proche qu’écrite sur un bac de tri. Au-delà de la connaissance nécessaire au geste, l’éducation à l’environnement crée une culture partagée des enjeux et inscrit les comportements dans l’univers du savoir et de la transmission indispensable à notre devenir et à notre développement d’éco-citoyen.

Nous n’avons jamais eu tant besoin et envie de changer, jamais si vite ni si profondément : s’emparer du changement de comportement pour le mettre au service des transitions indispensables à l’amélioration de notre empreinte environnementale et civilisationnelle est devenu une nécessité qui implique connaissances, engagement, empirisme, responsabilité et modestie. A nous tous, acteurs économiques et sociétaux engagés, de nous mobiliser.