Des filigranes numériques pour mieux recycler les emballages

#économie circulaire#centre de tri
Les filigranes numériques sont des codes invisibles à l’œil nu qui peuvent contenir une multitude d’informations sur les emballages et leur contenu. Placés en surface, ils peuvent être lus par des caméras intégrées aux machines de tri optique et optimiser la séparation en centre de tri pour permettre un recyclage de bonne qualité. C’est cette technologie que teste à grande échelle le projet Holygrail 2.0, piloté par l’association l’Association des Industries de Marque (AIM) et 85 entreprises et organisations partenaires, dont Citeo. Le projet Holygrail 2.0 en 5 points. 

Que sont les filigranes numériques ? 

Les filigranes numériques (appelés aussi digital watermarks) sont des codes de la taille d’un timbre-poste qui ressemblent aux codes-barres ou aux QR code, et qui ont la particularité d’être invisibles à l’œil nu ; ils peuvent donc se « cacher » derrière des décors d’emballage standards. Ils peuvent contenir une grande variété d’informations, notamment celles qui sont utiles à son recyclage en fin de vie : le matériau, le type de résine pour les plastiques, s’il s’agit ou non d’un contenant alimentaire, le nom du fabricant… etc.
En centre de tri, le filigrane numérique placé à la surface de l’emballage, peut être détecté et décodé sur la ligne de tri à l’aide d’une caméra haute résolution. A la lecture des informations, l’équipement de tri pourra diriger l’emballage vers la bonne filière en vue de son recyclage ou de sa valorisation, avec plus de précision, et selon de nouveaux critères.
Les informations contenues dans le filigrane sont également lisibles via un smartphone, ce qui laisse envisager d’autres applications (communication en direction des consommateurs, information sur le contenant, consigne de tri…).

Lors d’une rencontre Citeo Prospective, la société américaine Digimarc, l’une des pionnières dans ce domaine présentait la technologie

A quelles problématiques peuvent-ils répondre ? 

L’utilisation de ces filigranes pourraient améliorer nettement le tri et donc in fine la qualité du recyclage des emballages ; et par exemple des emballages suivants, pour lesquels les technologies de tri mécaniques et optiques actuelles ont leurs limites :

  • Les emballages multi-matériaux : c’est le cas par exemple des paquets de chips ou de café qui combinent plastique et aluminium afin de donner à l’emballage des qualités de conservation du produit. Cette combinaison de matière rend difficile l’identification de ce type d’emballages par les lignes de tri.
  • Les emballages sombres : ils doivent bien souvent leur couleur au noir de carbone que les machines de tri optique ont du mal à détecter. Des travaux d’éco-conception ont permis le développement de nouveaux colorants sombres plus compatibles et de protocoles de tests pour valider leur détection. Ces solutions sont complémentaires aux développements des filigranes.
  • La séparation alimentaire/non alimentaire : en permettant d’identifier les emballages qui ont contenu des aliments des autres emballages, les filigranes pourraient fortement faciliter le travail des recycleurs. Ils pourraient aussi favoriser l’intégration de matière recyclée vers des emballages alimentaires qui doit être, elle même, majoritairement issue d’emballages alimentaires. 

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Quels sont les 1ers constats sur l’efficacité de cette technologie ?
 

Dans le cadre des projets de la « New Plastic Economy », le programme de la fondation Ellen Mac Arthur, des entreprises se sont réunies pour étudier les différentes techniques de marquage existantes. Parmi ces sociétés, de grands groupes de la grande consommation comme Procter & Gamble, Danone, Nestlé, Pepsico, L’Oréal, Henkel et Carrefour. Les filigranes digitaux étaient une des options étudiées.
Avec la collaboration des fournisseurs de technologies de tri optique Tomra et Pellenc ST, de premiers tests positifs ont motivé la décision de monter un projet de plus grande ampleur pour continuer le développement des filigranes : Holygrail 2.0.

Michelle Gibbons, directrice générale de l’AIM

Michelle Gibbons - DG AIM

« Les trois ingrédients clés ici sont l’innovation, la durabilité et le numérique, combinés pour atteindre l’objectif du Pacte vert, à savoir une économie propre, circulaire et climatiquement neutre. C’est formidable de pouvoir fédérer une telle expertise venant de toute la chaîne de valeur des emballages, depuis les marques jusqu’aux distributeurs en passant par les transformateurs, les programmes de REP, les systèmes de gestion des déchets, les acteurs du recyclage et bien d’autres. La collaboration est la voie à suivre pour parvenir aux objectifs de l’Union européenne concernant l’économie circulaire. »

Sophie Genier, directrice services recyclage de Citeo

« Citeo, qui soutient aussi le développement de la technologie dans le cadre de son programme d’open innovation Circular Challenge, a la conviction que les filigranes numériques sont une des innovations qui contribueront à l’atteinte du 100% solutions pour les emballages et les papiers.
Citeo apporte son expertise tout au long des phases de tests techniques et industriels du projet, et pourra contribuer au déploiement des filigranes numériques, si les résultats sont concluants. 
»

Quels sont les résultats des tests déjà réalisés ?

Pendant plus de 3 mois, des tests ont été menés à Copenhague avec le prototype développé par Pellenc ST et Digimarc. Ces tests, à l’échelle semi-industrielle, ont porté sur 125 000 emballages, volontairement souillés et vieillis, marqués des filigranes numériques. Mélangés à d'autres types de déchets, l’enjeu était de pouvoir les identifier et les isoler à part. Résultats des tests : 99% de détection, 95% d'éjection et 95% de taux de pureté obtenu. Une réussite !

Début 2023, suite à ces très bons résultats, la phase industrielle du projet a commencé. Cette fois, même technologie, mais direction le site de recyclage de Wellman à Verdun. Le défi à révéler : identifier et séparer des bouteilles en plastique PET ayant contenu des produits non alimentaires (du shampoing par exemple) issues d’un ensemble de bouteilles en PET majoritairement alimentaires.

Les tests semi-industriels en 4 étapes

Légendes :

  1. Ces emballages contiennent les filigranes numériques, invisibles à l’œil nu.
  2. Ils sont acheminés vers la machine chargée de les identifier parmi un flux d’autres emballages, puis de les éjecter.
  3. Les emballages passent devant le lecteur (lumière bleue !). La vitesse à laquelle les filigranes cachés sur les emballages sont lus est de 3 m/s (mètre par seconde) et jusqu’à 4,5 m/s.
  4. Les emballages ainsi identifiés sont éjectés du flux principal pour constituer un nouveau flux composé uniquement d’emballages contenant les filigranes. 

Quelle suite dans les mois à venir ?

Des tests seront réalisés en fin d’année sur des emballages souples (sachets, films). A noter que ce sont les entreprises qui fournissent des emballages de leurs produits pour les tests, dont Procter & Gamble, Essity ou encore PepsiCo Inc.

Et début 2024, il est prévu le lancement d’une phase d’expérimentation à grande échelle. Avec cette fois un très grand nombre d'emballages rigides en plastique, porteurs du marquage numérique (mais invisibles pour les consommateurs !), qui seront mis en rayon, triés par les consommateurs, collectés, puis récupérés par Veolia qui fera des tests de recyclage en conditions réelles. Procter & Gamble, L'Oréal ou encore Henkel participeront à ses essais soutenus par Citeo. Appels à volontaires : d'autres entreprises sont les bienvenues pour intégrer le projet. A suivre ! 

#économie circulaire#centre de tri#emballages
Des filigranes numériques pour mieux recycler les emballages